La CNAPD poursuit son combat en faveur de plus de démocratie à travers une campagne pour la citoyenneté européenne de résidence. Carole, stagiaire, a interrogé Sandrine, notre chargée de projets, pour mieux comprendre en quoi consiste cette campagne et quels sont les enjeux qui se trament derrière le concept de citoyenneté européenne de résidence (CER).

Quelle est la définition de la citoyenneté européenne ?

Il existe plusieurs définitions. Selon une définition stricto sensu retenue par l’Union européenne, on peut définir un(e) citoyen(ne) européen(ne) comme toute personne ayant la nationalité d’un Etat membre de l’Union européenne. Selon cette définition, la nationalité serait donc soumise à un critère de nationalité. Certains droits civils et politiques, ainsi que des devoirs civiques qui définissent le rôle du citoyen dans la société et face aux institutions, vont avec cette citoyenneté.

Si on focalise notre analyse sur le droit de vote des citoyens européens, on voit qu’il existe un droit de participation aux élections du Parlement européen passivement et/ou activement dans leur Etat d’origine ou de résidence.

De plus, lors des élections municipales, le citoyen européen bénéficie de facto d’un droit de vote et d’éligibilité dans les mêmes conditions que les nationaux de l’Etat où il réside sans que ce droit n’empiète sur ses droits dans son Etat d’origine.

En quoi être résident européen diffère-t-il tellement du statut de citoyen européen?

Un citoyen européen est une personne qui a la nationalité d’un des Etats membres de l’Union européenne qu’il réside ou pas dans l’un des pays de la zone européenne. Tandis qu’un résident habite dans l’un des Etats membres de l’Union européenne et contribue à la vie de société, il peut être citoyen européen ou non.

Quel est l’impact dans la vie des résidents non-européens de cette absence de statut de citoyen ?

Il y a plusieurs conséquences dommageables: non seulement des limitations au droit de circulation bien que nous soyons dans l’espace Schengen, mais surtout des problèmes relatifs au droit de séjourner dans les autres pays de l’Union européenne.

Mais ce qui est troublant, pour la CNAPD en tout cas, c’est l’impact en termes de participation à la vie politique locale. Concernant le droit de vote, les ressortissants étrangers non-européens résidents d’un pays de l’UE, n’ont pas le droit de voter aux élections européennes. Quant aux élections municipales (qui sont quand même des élections locales), ce droit de vote, pierre angulaire de toute démocratie républicaine, peut être octroyé ou pas à un ressortissant d’un pays tiers selon la volonté des États membres. Autrement dit, il n’existe pas de cohésion et le choix est laissé au libre arbitre et à la souveraineté des États.

En ce qui concerne la Belgique, le droit de vote aux municipales a été accordé en 2004 pour les personnes résidant légalement depuis 5 ans sur le territoire belge.

En revanche, le Royaume-Uni accorde le droit de vote à tous les échelons de pouvoir aux ressortissants étrangers en fonction du principe de réciprocité.

Malgré le fait qu’il y ait la nécessité de répondre à certaines conditions, certains pays accordent donc des droits aux résidents non citoyens. D’autres, par contre, n’accordent aucun droit aux ressortissants d’un Etat non membre de l’Union européenne.

Pourriez-vous nous expliquer en quelques mots la campagne pour « la citoyenneté européenne de résidence » de la CNAPD ?

Le but ultime des revendications de la CNAPD est l’extension du statut de citoyen européen aux étrangers résidant légalement sur le territoire de l’Union européenne. La CNAPD a fixé la durée de résidence sur le sol d’un Etat membre à minimum 5 ans.

L’objectif de la campagne est de mettre un terme à l’exclusion des étrangers de la citoyenneté européenne. Nous l’avons vu, la définition de la citoyenneté retenue par les institutions européenne reste attachée au critère de la nationalité. La « citoyenneté européenne de résidence » a pour objectif de soumettre le droit de vote à un critère plus juste: le critère de résidence. La logique est la suivante : on doit pouvoir participer à la vie politique, à la construction de la société, du bien commun, là où on vit.

Pourquoi commencer cette campagne maintenant ?

La CNAPD a présenté cette nouvelle campagne en mars 2013. En effet, nous sommes dans une période clé, il va y avoir des élections européennes, fédérales et régionales en 2014. Il s’agit donc d’une date importante en Belgique.

Par ailleurs, depuis les élections communales de 2006, les étrangers non européens ont pu voter. Et force est de constater que toutes les craintes engendrées par ce vote des « allochtones » se sont révélées infondées.

A une époque de mondialisation où les biens, les personnes et les capitaux sont mobiles, il est illogique d’octroyer le droit de vote sur le critère de nationalité.

Il faudrait que l’Union européenne se montre plus progressiste par rapport à ce droit qui permet de véritablement faire entendre sa voix, de participer à la construction et aux grandes décisions de la société où ils vivent. Ces étrangers, résidant depuis plus de 5 ans, ont légitimement le droit de se faire entendre.

Existe t-il des fondements juridiques à ces revendications ?

Oui, le Pacte International relatif aux droits civils et politiques de 1996, la Charte des droits fondamentaux de l’Union Européenne de 2000, notamment, sont des textes juridiques qui se veulent respectueuses des droits fondamentaux, des valeurs profondes de la démocratie.

Quelles sont les actions menées par la CNAPD pour soutenir cette campagne ?

Nous avons travaillé en partenariat avec certains de nos membres : les jeunesses politiques progressistes et une association spécialisée dans la thématique du « vivre ensemble ». Ensemble, nous avons élaboré un mémento qui a été imprimé et qui est en train d’être diffusé à des associations et personnalités politiques afin qu’ils se joignent au comité d’appui créé récemment. Ce mémento est disponible sur simple demande ou en téléchargement.

Nous avons également organisé une conférence avec Henri Goldman, rédacteur en chef de la revue Politique (que vous pouvez consultez directement en ligne)

Quelles types de réticences avez vous rencontré vis-à-vis de la campagne?

Vous savez, parfois, les gens ont peur des changements ou de l’inconnu. Hors, une communauté politique, c’est une construction constante qui résulte d’adaptation à des situations historiques précises, à des changements dans la société. Il faut donc accepter que la société est quelque chose en mouvement et pas statique. Nous pourrions citer le droit de vote des femmes. A cette époque, ce changement a bouleversé les opinions et a modifié la représentation de la société que les personne avait.

Or, qu’en est-il de tous ces débats aujourd’hui ?

D’autre part, quant à la peur du vote communautariste,  elle a été balayée par les élections communales de 2006 où pour la première fois en Belgique, les ressortissants des Etats tiers à l’Union ont pu voter (mais pas être élus). Nous vivons dans une société multiculturelle dans laquelle les nationaux belges sont d’origines multiples. A titre d’exemple, nous pouvons nous rappeler de la vague d’immigration italienne.

Selon vous, quelles sont les personnes capables de faire changer cette restriction à l’accès au droit de vote et d’éligibilité des étrangers ?

Les politiques par des changements législatifs bien sûr. Mais ces changements ne verront le jour que si les citoyens se mobilisent pour revendiquer le droit qu’il leur est dû.

Rétrospectivement, quand on regarde les arguments avancés contre le droit de vote des femmes, cela peut paraître risible à l’heure actuelle. Nous espérons que dans quelques années il en sera de même avec les arguments contre le droit de vote des étrangers. Voici un extrait de la thèse du français Émile Morlot (1884) : « De la capacité électorale »: En vain prétend-on que l’égalité civile accordée à la femme a pour corollaire nécessaire son émancipation politique. C’est méconnaître absolument le rôle de la femme dans l’humanité. Destinée à la maternité, faite pour la vie de famille, la dignité de sa situation sera d’autant plus grande qu’elle n’ira point la compromettre dans les luttes du forum et dans les hasards de la vie publique. Elle oublierait fatalement ses devoirs de mère et ses devoirs d’épouse, si elle abandonnait le foyer pour courir à la tribune.

Quelles sont les prochaines actions prévues dans le cadre de cette campagne ?

La CNAPD souhaite élargir le comité d’appui tant au niveau belge qu’européen pour avoir un réel poids dans la balance politique. La CNAPD a besoin de partenaires engagés et motivés.

La CNAPD a prévu d’organiser des conférences-débats ainsi que de multiples activités et événements adressés aux jeunes avec des partenaires jeunesses.

Et bien d’autres activités qui seront annoncées sur notre site et notre page Facebook.

Comment soutenir ce projet ?

Si vous souhaitez organiser une rencontre ou une séance d’information près de chez vous n’hésitez pas à contacter Sandrine Pierlot, chargée du projet par mail ou par téléphone 02/640.52.62.

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