Les textes publiés par les membres de la CNAPD n’engagent que ledit membre et non la CNAPD ou ses autres membres.

La démocratie n’est jamais acquise. Elle s’acquiert à chaque débat, chaque vote. Le Parlement doit être plus qu’une façade de démocratie, c’est un lieu de débat et d’échange d’idées, un lieu où le peuple, par ses représentants, influe sur l’évolution du cours des choses.

Pour une des plus importantes décisions qu’un Etat peut prendre, une décision qui peut mettre en danger des vies humaines, non seulement le débat démocratique est absent en Belgique, mais le droit et l’accès à l’information aussi. En effet, la décision d’envoyer l’armée belge dans une région en guerre incombe au Gouvernement seul. Au plan constitutionnel, il n’y a pas de consultation parlementaire, pas de débat, pas de vote. L’accès aux informations qui concernent ces opérations, le coût que cela engendre, le degré de risque pour nos militaires, tout ceci demeure opaque tant aux yeux des parlementaires qu’à ceux des citoyens. La vie des militaires belges est, au final, dans les mains d’une poignée de personnes qui se concertent à l’abri des regards.

C’est l’article 167 de la Constitution, jamais modifié depuis l’indépendance, qui consacre cette situation. Sa formulation, totalement dépassée au regard de l’évolution du droit et de la démocratie depuis la Seconde guerre, laisse entièrement les mains libres à l’exécutif tout en réfutant le principe du contrôle parlementaire, voire même du droit d’enquête des élus.

En comparant la situation des autres pays européens, notre inertie démocratique n’en est que plus flagrante. En Allemagne, en Espagne, en Irlande ou en Slovaquie, tout envoi de troupes fait l’objet d’un vote parlementaire préalable. A Suède impose que toute intervention soit conforme à ses engagements internationaux, notamment à l’ONU. La France impose une autorisation parlementaire pour les interventions de plus de 4 mois. Les parlementaires tchèques peuvent même exiger le rappel de troupes déjà déployées à l’étranger. Ce qui pourrait paraître évident ne l’est pas pour la Belgique.

Les débats qui ont secoué les opinions publiques du Royaume-Uni, des Etats-Unis et de la France alors que leurs gouvernements manifestaient des velléités d’interventions en Syrie démontrent à quel point le sujet des interventions militaires est un enjeu central de la démocratie.

Il est temps que la Belgique adapte sa législation pour l’accorder aux évolutions du droit et à la nécessité du débat. Deux principales raisons militent en faveur d’une meilleure implication du Parlement belge concernant les opérations extérieures. Le coût de ces opérations n’a cessé d’augmenter ces dernières années et enfin, une meilleure implication du Parlement permettrait de renforcer la légitimité des opérations.

Dans une étude récemment publiée, Pax Christi Wallonie-Bruxelles propose de procéder à un amendement à l’article 167 de la constitution belge afin de remettre l’entrée en guerre dans les mains du Parlement et obliger le gouvernement à la transparence la plus complète. Cette proposition s’inspire des règles constitutionnelles de nos voisins européens :

  • octroi par le Parlement d’un mandat d’un maximum de 4 mois, renouvelable ensuite d’année en année,
  • obligation de respecter les engagements internationaux de la Belgique, notamment à l’ONU
  • information complète et précise des parlementaires

L’entrée en guerre est un sujet qui ne laisse indifférent, elle enflamme les consciences. L’échéance électorale de 2014 serait une occasion de procéder à cette modification et permettrait ainsi de redorer le blason de nos procédés démocratiques

L’étude complète est disponible en téléchargement ici.

Les textes publiés par les membres de la CNAPD n’engagent que ledit membre et non la CNAPD ou ses autres membres.

Laisser un commentaire

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.