Nous partageons le discours tenu par notre coprésident Gregory Mauzé au nom de la CNAPD, invitée par la commune de Forest pour porter une voix antimilitariste aux commémorations du 11 novembre.

« Pour une association pacifiste comme la CNAPD, les commémorations de l’armistice sont avant tout une invitation à la réflexion sur la guerre et ses conséquences. Il y a, bien sûr, le temps du recueillement. Celui du souvenir des innombrables vies brisées par cette boucherie qui a ensanglanté notre continent à une ampleur industrielle. Celles des combattants, qu’ils aient été tués sur le champ de bataille ou marqués à vie par les séquelles physiques ou psychologiques de la guerre. Le souvenir, également, du calvaire enduré par les non-combattants, majoritairement constitués de femmes, ouvrières, infirmières ou assurant simplement au quotidien le maintien de la vie sociale du pays, et qui ont contribué à la résistance à l’occupation.

Mais rendre hommage à celles et ceux qui ont subi cette guerre, c’est aussi se rappeler les conditions qui ont permis cette folie collective. Rien ne prédestine l’humain à détruire son prochain. L’Homme ne se réduit pas par lui-même à ce niveau de dépravation. « On croit mourir pour la patrie, on meurt pour des industriels », disait déjà Anatole France. Si le sens du sacrifice sur le champ de bataille force le respect, un autre courage doit donc également être honoré : celui d’avoir su dire non à l’embrigadement. C’est celui d’une Rosa Luxemburg en Allemagne, ou d’un Jean Jaurès en France, qui le paiera de sa vie. C’est aussi celui des pacifistes anonymes du quotidien, tels que les neuf fusillés belges pour l’exemple de 1914, qu’il convient aujourd’hui de réhabiliter sur le plan moral, civique et collectif.

Surtout, les commémorations de ce jour invitent à regarder le présent avec lucidité, et à poser les actes concrets pour que jamais nous ne connaissions à nouveau pareil fléau. Le retour du « spectre de la guerre » en Europe suscite une inquiétude bien légitime parmi nos concitoyens. Mais que l’on ne s’y trompe pas : la course effrénée au réarmement, loin de nous protéger, ne conduira qu’à une hausse perpétuelle des tensions, et à une spirale susceptible de nous entraîner collectivement, une fois de plus, vers l’abîme.

Le combat pour une résolution non violente des conflits ne pourra pas triompher si l’on n’alimente pas au jour le jour l’espérance d’un monde de paix. C’est dans cette optique que la plateforme Stop Militarisation – que nous portons avec d’autres – préconise la désescalade, la diplomatie et la fin du glissement vers le tout sécuritaire. Saluons aussi les initiatives telles que « Service for Peace », lancée par diverses associations et mouvements de jeunesse en réaction aux velléités gouvernementales d’encourager le service militaire volontaire. Au réflexe guerrier, ces organisations opposent des alternatives axées sur la justice sociale, la coopération et la paix.

La naïveté n’est pas toujours là où on le croit. Il est facile de pousser à la guerre. Beaucoup moins de poser les actes concrets pour désamorcer les conflits et construire les fondations d’un monde basé sur la paix par la justice. Alors que l’aide internationale s’effondre dans des proportions alarmantes, rappelons que « la solidarité est la tendresse des peuples », et qu’aucune paix durable ne pourra advenir sans résorber les déséquilibres en matière de développement.

Osons opposer au militarisme ambiant une culture de la paix, qui privilégierait la fraternité au ressentiment, l’accueil au repli, le patriotisme ouvert au nationalisme obtus. Car œuvrer à réaliser l’utopie d’un monde tournant définitivement le dos aux guerres pour les générations futures reste le meilleur hommage que l’on puisse rendre au sacrifice des générations passées. »

Gregory Mauzé, coprésident de la CNAPD

 

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