Les politiques carcérales ne sont pas au centre des débats télévisés ou en couverture des principaux journaux du pays, pourtant leurs impacts oui. Ainsi, nous notons un paradoxe. En effet, personne ne s’intéresse vraiment aux conditions de vie des détenus ou de la privatisation inquiétante du système carcéral belge. Rappelons que la Belgique a été condamnée pour ses conditions de détentions par la CEDH en 2014. A contrario, la radicalisation, l’augmentation du nombre de fusillades à Saint-Gilles, la toxicomanie de plus en plus présente dans les rues de Bruxelles sont régulièrement traitées par les grands médias belges. Ces phénomènes sont liés à l’implantation de politiques carcérales controversées. Effectivement, prenons l’exemple de la toxicomanie qui ronge les prisons, le SPFJ a affirmé que deux personnes sur trois dans les prisons belges avaient consommé des substances illégales et qu’après le cannabis, c’était l’héroïne la drogue la plus consommée. Ces personnes addictes ont besoin d’un suivi et d’un accompagnement pour leur sortie mais comment l’effectuer quand les prisons belges affichent un taux d’occupation de 115% (Prison Insider), soit 12 316 détenus pour 10 743 places (SPF Justice). 

Par ailleurs, il est bon de rappeler les objectifs principaux des Masterplan (la première date de 2008) selon SPF Justice et la Régie des Bâtiments après avoir lu le rapport du CCSP1:

  • Un programme de rénovation pour récupérer les capacités perdues dans les établissements existants ;
  • Un programme de rattrapage pour la rénovation afin de garantir des conditions de vie plus humaines et plus sûres ;
  • La construction de cellules supplémentaires sur des sites existants pour remédier à la surpopulation ;
  • La construction de nouveaux établissements pour remédier au besoin croissant et générer une capacité « tampon » pour pouvoir rénover les anciens établissements dans des conditions sécurisées ;
  • La construction de nouveaux établissements en remplacement des établissements très vétustes.

Cette politique carcérale belge et ce besoin de toujours construire plus de prisons a été pointé du doigt par le Conseil Central de surveillance pénitentiaire (CCSP), organe créé par le gouvernement en 2019. Effectivement, celui-ci avait déclaré dans son rapport annuel de 2022/2023 (à confirmer) que : « les arguments avancés par la recherche criminologique, qui démontrent que la prison n’est cependant pas la solution à privilégier face à la délinquance, sont ignorés ».

Cependant, cette politique belge ne vient pas de nulle part, elle répond aussi à un besoin grandissant de la population de punir les personnes marginalisées dans un contexte où le sentiment d’insécurité devient global. Notons que les politiques carcérales sont ancrées dans un paradoxe politique. D’un côté nous avons pu assister à une augmentation des droits des prisonniers et une mise en avant des biens faits de la réinsertion depuis les années 80 environ. D’un autre côté, elles sont le symbole des politiques sécuritaires et répressives qui permettraient une « protection de la population ». Ainsi, ce double discours nous amène à la question suivante : Pourquoi considérons-nous les politiques carcérales comme des politiques sécuritaires et non pas comme des politiques sociales ?  

Le but de cette suite d’articles est d’aborder la question de la privatisation, de la politique zéro tolérance, des conditions de travail et de détention dans les prisons belges. 

1. Détention et internement dans des conditions humaines | Régie des Bâtiments (regiedesbatiments.be)

Crédit photo : RTBF, Titre : Cellule Prison Lantin

Sicot Ludovic

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